Taïga Saisie par les Glaces

On nous observe, j'en mettrai ma main au feu... Enfin, c'est plus une façon de parler, même si c'est sûr que ça la réchaufferait un peu. J'essaie de plaisanter pour me rassurer, mais cette taïga ne m'inspire pas confiance. Je sens plein de présences dissimulées depuis tout à l'heure : quand j'ai pêché les petits poissons, quand je les ai fait griller, quand on s'est remis en route... J'ai le sentiment que quelque chose d'énorme est passé ici, entre les grands pins et les séquoias, laissant une trace résiduelle derrière elle, sous la forme d'une vague de froid. Ce devait être une très forte personnalité, car elle a délogé nombre d'animaux sur son passage, qui reviennent peu à peu maintenant que son essence se dissipe petit à petit. Mais avec leur retour, d'autres choses sont aussi en train de réinvestir les lieux. J'ai des picotements derrière la nuque. Et ça, je sais ce que ça veut dire : on nous espionne. Je me retiens de ne pas me retourner toutes les cinq minutes.

Le terrain semble se dégager pour nous offrir une clairière vallonnée, toujours entourée de ces arbres gigantesques, dont des sapins et des bouleaux au tronc craquelé. C'est sans doute le moment pour essayer d'en avoir le cœur net. Je fais une pause avec mes compagnons de route et scrute la futaie. Des bruissements suspects, des branches qui bougent... L'atmosphère est pesante. L'autre présence, toujours aussi forte, semble garder nos espions à distance tant que nous restons dans le sillage de son passager. À l'aide d'un peu de Mana, je ferme les yeux et ouvre mon esprit à la taïga. Je me projette autour de cet espace, fouillant les buissons à travers le Skein. Ma respiration se fait plus hachée alors que je sens les Belisenki nous encercler petit à petit. J'ouvre les yeux et avertis mes compagnons. Mieux vaut ne pas traîner ici. Suivons la piste de la présence qui tient nos observateurs en respect. C'est la voie la plus sûre à suivre.

RIN

393 AC